“Si tu n’as pas de piston, pas de réseau et en plus … pas de chance, tu peux passer l’été sans trouver le moindre job“. Jusqu’à ce mois de juillet, Florence n’avait décroché que des petits boulots dans l’horeca ou dans des call centers. Des jobs pénibles, ingrats et qui surtout ne lui donnaient qu’une image peu valorisante du monde du travail. Cette année pourtant, elle passe le mois de juillet dans une agence bancaire, “un endroit où je n’aurais pas pensé à postuler spontanément, certaine de n’avoir aucune chance“. La candidature de cette étudiante en droit a pourtant été retenue par BNP Paribas Fortis qui a ouvert cette année une septantaine de places pour des jeunes qui n’étaient pas les enfants de membres du personnel. La candidature de Florence a été soutenue par Be.Face. Selon les chiffres de l’ONSS, à peine 7 % des contrats étudiants conclus en Belgique, bénéficient aux jeunes Bruxellois.
Il faut dire que les entreprises privilégient souvent les enfants du personnel. Or ce personnel n’est pas forcément bruxellois, loin de là! Et puis, il y a la méfiance: celle dont pâtissent les jeunes dont “on ne sait rien” et dont le nom est un peu exotique. Peu à peu, les mentalités changent néanmoins. Certaines entreprises choisissent de s’ouvrir à la diversité. Mais de telles initiatives sont encore rares.
A Cureghem et Molenbeek, ASBL Maks veut donner aux jeunes du quartier l’occasion d’avoir un vrai job, avec un vrai contrat, et cela le plus tôt possible. Les mettre en contact avec un travail valorisant, c’est le combat de Véronique De Leener, la directrice de Maks :”Dans nos quartiers, quand les jeunes quittent l’école, un sur deux ne travaille pas. Pour moi, il faut les activer le plus tôt possible, avant qu’ils n’aient décroché de l’école“.
Maks a donc mis au point le programme Capital Digital, 30 heures de formation pour des jeunes de 15 à 18 ans. S’ils réussissent cette formation en programmation de jeux, ils pourront décrocher un job d’animateur pour des stages de vacances avec les enfants du quartier. Un effet “boule de neige”, selon Véronique De Leener; “Travailler, c’est de l’argent bien sûr, mais cela projette une meilleure image de soi notamment aux parents ou aux copains du quartier“.
Un pied à l’étrier pour prendre confiance en soi
Ousmane termine cette formation. Dans quelques jours, il aura peut-être de nouvelles responsabilités. Celles de s’occuper d’enfants parfois turbulents…”quand j’étais petit, moi, j’étais une vraie pile électrique, alors ce boulot, cela ne va pas être facile. Mais je vais m’y faire, l’argent, il faut le mériter“. Et il le confirme, trouver un vrai job d’étudiant dans le quartier, quand on a 17 ans, c’est vraiment difficile. Et en quelques jours de formation, Mustapha, l’un des moniteurs du groupe, a vu les jeunes changer. “S’occuper d’enfants, cela les responsabilise et en plus dans un domaine comme l’informatique, cela les valorise. Qui sait, cela leur donnera peut-être des idées de métiers pour plus tard“.
Véronique De Leener ne dit pas autre chose. “Nous voulions leur donner un job valorisant et qui soit un plus sur leur CV“. Pour cela, la quinzaine de jeunes inscrits chez Capital Digital devront aussi acquérir les codes du monde du travail : Arriver à l’heure. Ne pas consulter en permanence son GSM et les réseaux sociaux. Un déclic aussi pour ensuite oser postuler ailleurs, dans un autre quartier, dans un autre secteur, l’an prochain.
RTBF, 9 juillet 2018
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