Les filières paramédicales ne sont pas les seules à attirer chez nous de nombreux étudiants français. Dans l’enseignement supérieur artistique, ils représentent plus d’un étudiant sur trois en Fédération Wallonie-Bruxelles. Ce qu’ils recherchent chez nous : des écoles plus accessibles, moins chères, mais aussi de qualité.

Accessibilité et avantage financier

À l’École Supérieure des Arts de Saint-Luc à Bruxelles, 28% des 723 étudiants sont Français. Une proportion qui grimpe à 56% dans certaines sections particulièrement prisées comme illustration ou bande dessinée.

Et quand on leur demande les principaux avantages de leurs études chez nous, la réponse est souvent la même. “C’est surtout l’aspect financier, nous confie Clément Guinguet, un jeune Parisien de 20 ans. Rien que le fait de se loger est quand même plus accessible ici qu’à Paris“. D’autant qu’en France, de nombreuses écoles imposent des concours d’entrées auxquels ils ont parfois échoué avant de tenter leur chance en Belgique.

Enseignement de qualité

Mais nos écoles ne sont pas toujours un second choix. Ces étudiants trouvent aussi chez nous un enseignement réputé au contact de professeurs qui sont de vrais professionnels dans leur domaine. C’est le cas d’Eric Lambé. Auteur, illustrateur de bande dessinée et professeur à Saint-Luc.

Une section bande dessinée, on ne trouve pas ça dans forcément beaucoup d’écoles, précise-t-il, et il y a encore peu d’écoles qui permettent à des gens de 17-18 ans de commencer à faire directement de la bande dessinée. En général on leur propose plutôt un cursus plus ouvert et de se perfectionner par après“.

Pas de quotas

Et il n’y a pas que la bande dessinée qui attire les Français en Belgique. Illustration, musique, théâtre, technique de diffusion… Dans l’enseignement supérieur artistique chez nous en 2005-2006, près d’un étudiant sur quatre était français. Pour l’année scolaire 2017-2018, ils étaient 2568 sur un total de 7680 étudiants, soit plus d’un sur trois dans les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Pourtant, dans le secteur artistique, pas question d’imposer des quotas d’étudiants étrangers comme en logopédie ou en kiné. “Je pense que si on mettait des quotas ça nous serait préjudiciable, explique Marc Streker, directeur, parce que finalement on a la capacité physique d’accepter tous ces étudiants français qui postulent chez nous“. Traduisez : les étudiants français ne prendraient donc pas la place des Belges.

Meilleure préparation aux épreuves d’admission

Mais qu’en est-il dans les établissements plus sélectifs ? À l’École Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre, les Français représentent 55% des 700 étudiants. Et lors des épreuves d’admission, ils arrivent souvent bien mieux préparés que les Belges en suivant par exemple l’une ou l’autre “prépa”, des années préparatoires aux concours d’entrée dans les grandes écoles françaises. Un dispositif qui ne peut pas être mis en place en Belgique.

Salomé Bodin a 20 ans. Originaire de Nantes, la jeune femme est en deuxième année de stylisme et de mode. Mais avant ça, elle a déjà suivi deux années de supérieur technique dans son pays.

Je faisais un BTS design textile en France, précise-t-elle, donc je suis arrivée avec ce bagage-là et mes échantillons. Puis spécifiquement en stylisme, il y a des concours pour lesquels ont doit monter une toile, faire des dessins et un catalogue. On se renseigne et on va aux portes ouvertes ce qui nous permet d’anticiper et de faire le concours sur la semaine“.

Les Belges désavantagés?

Difficile alors pour les jeunes Belges sortant de rhéto de rivaliser avec ces Français sur-préparés. Même si on nous assure que d’autres éléments entrent en compte.

De toute façon, les étudiants arrivent ici sur un même pied au niveau de cette épreuve d’admission, insiste le directeur Benoît Hennaut. Elle dure une semaine complète avec un même nombre d’exercices ce qui permet de rencontrer les potentiels, les personnalités. Mais la préparation ne joue pas forcément en faveur des étudiants qui auraient suivi un cursus de prépa très cadenassé.”

Programme préparatoire

Depuis 5 ans pourtant, La Cambre a mis en place des programmes d’acclimatation pour les 5ème et rhéto de Wallonie et de Bruxelles. Des cours le mercredi après-midi et des stages d’observation pendant les congés scolaires pour leur donner de meilleures chances. Lissa Djata a 18 ans et a été reçue en première année de scénographie. Elle a suivi ces différents programmes l’année dernière.

Ça m’a aidée parce qu’au final j’ai pu déjà parler avec des professeurs de scénographie, avec des élèves de scénographie et leur demander plus ou moins ce qu’ils faisaient, explique la jeune étudiante. Je n’étais pas méga confiante parce qu’on était 21 à la base et 7 à être pris, mais j’ai beaucoup aimé.”

Bon marché

La mobilité des étudiants en Europe, facilitée par le décret Bologne, joue beaucoup dans l’attractivité de la Belgique pour les Français. La Cambre entend d’ailleurs s’inscrire dans le paysage d’un enseignement francophone de qualité à l’échelle européenne.

Mais en plus d’un enseignement de qualité, les Français trouvent chez nous des écoles bon marché. Le minerval à La Cambre comme à Saint-Luc est de 350 euros l’année, grâce aux pouvoirs publics belges.

Sarah Heinderyckx, RTBF.be, publié le 11/10/18

L’équipe du Cepha, Conseillers en orientations scolaire et professionnelle.